Fiche lecture "FOCALISER SUR UNE FIGURE(chapitre 15)"- John Bowlby « ATTACHEMENT ET PERTE » - éditions puf 5ème edition 2002- 1er edt. 1978
Alors que lors de la première année l’enfant est particulièrement attaché à sa figure maternelle, J. Bowlby nous fait remarquer que progressivement l’enfant se dirige vers d’autres figures plus ou moins éloignées de celle-ci. Il différencie les choix de l’enfant qui les hiérarchisent par besoins. Ceux qui concerneront la sécurité, les soins et l’alimentation auront tout d’abord la préférence de l’enfant qui se tournera vers une autre figure auxiliaire pour des activités d’amusement. Il est intéressant de comprendre que les figures auxiliaires qui ont une destinée de relations sociales à travers des activités de jeu seront différenciées par l’enfant, tout en sachant que celles-ci restent dans l’environnement proche de l’enfant et peuvent être la fratrie, le père ou grands-parents. Il est intéressant de souligner que l’intensité du lien avec la figure d’attachement principale favorisera la relation avec les figures auxiliaires et que dans le cas inverse cela défavorisera ce lien social : « plus un enfant est dans l’insécurité, et plus il est inhibé pour développer des relations de jeu avec d’autres figures. » (P410) John Bowlby montre que la relation d’attachement à la figure principale aura « des implications à longue portée sur la psychopathologie » (P411)
Autres que les figures maternelles et auxiliaires l’enfant tourne également son intérêt vers des objets inanimés pour exercer ses activités d’agrippement et de succion non-nutritionnelle. J. Bowlby souligne que la succion apparaît dès la naissance et celle de l’attachement à un objet apparaît à partir de l’âge de neuf mois sans écarter le fait que pour certains cela peut aller après l’anniversaire de la première année. Bien entendu nous pouvons remarquer l’apparition de la conscience de l’objet qui poursuit son développement dans cette période et qui induit généralement la séparation au sein.
À propos de Winnicott, John Bowlby nous rappelle que « La signification théorique de l’attachement d’un enfant a été discutée par des cliniciens, en particulier par Winnicott (1953) qui les a désignés sous l’expression d'objets transitionnels ». Dans le schème théorique qu’il propose, il considère que ces objets occupent une place spéciale dans le développement des relations objectale ; ils appartiennent, selon lui, à une phase au cours de laquelle un nourrisson est sur la voie du symbolisme quoiqu’il ne soit guère capable de l’utiliser : d’où le terme transitionnel ». Néanmoins John Bowlby discute le rôle de ces objets en opposant qu’« il serait plus approprié de les désigner simplement par l’expression de « substituts objectaux » . Il poursuit en faisant une analogie avec les primates « cette sorte d’objet peut fréquemment tenir lieu de figure d’attachement quoique auxiliaire. » Il m’apparaît que ces deux idées au contraire de s’annuler trouvent leur complémentarité et participent grandement au processus de séparation au sein tant dans la dimension affective d’attachement que dans celle de sa maturation. Rappelons Bowlby qui nous dit que plus le lien d’attachement est effectif et plus le lien social est favorisé : le rôle transitionnel de l’objet peut être compris comme tenant la première fonction et induisant la seconde
J. Bowlby montre dans cette partie que l’importance du lien social corollairement aux soins donnés favorise grandement l’intérêt de l’enfant et à l’inverse si l’apprentissage du lien social est moins présent cela suscite moins d’intérêt chez le même enfant pour ladite figure dite principale.
De ces interactions sociales, l’auteur rappelle, que dès 9 mois il est constaté une différence de développement psychique entraînant un retard d’attachement entre les enfants chez qui la relation sociale a été très tôt suscitée et ceux chez qui à l’inverse ce lien n’a pas été favorisé au profit des seuls soins, de sécurité et de nutrition : « D’après ce que l’on constate il semble que ce sont habituellement des enfants qui, pour une raison ou pour une autre, ont eu beaucoup moins de stimulations sociales provenant d’une figure maternelle que ceux dont le développement a été plus rapide »
Etant établi que la stimulation sociale a un rôle prépondérant dans le développement psychique et d’attachement par l’activation des sens de l’enfant. Il propose d’identifier ceux qui ont un rôle prépondérant dans l’activation de la socialisation. Il en vient rapidement à déterminer que le visuel et l’ouïe ont un rôle prépondérant favorisant ainsi l’interaction. Bien entendu l’auteur insiste sur le sens tactile du contact physique qui n’est pas à écarter mais un juste milieu est à trouver même en simultané.
J. Bowlby fait remarquer qu’en favorisant la stimulation de l’interaction sociale, tout en sachant que le lien d’attachement à la figure principale reste primordial, l’enfant éprouvera moins d’appréhension à se tourner vers la figure qui n’est pas principale ou pourrait devenir auxiliaire. Ainsi, il pourrait être dit que plus l’attachement est établi et inclue l’apprentissage du lien social dans les premiers mois plus l’enfant aura des capacités à éprouver avec moins de difficulté la séparation.
L’auteur signifie trois phases distinctives dans le processus de la crainte de l’étranger à son environnement : La phase de non-différenciation – la phase de rapprochement aux éléments extérieurs à ceux qui sont familiers – La phase de l’appréhension au regard de ces mêmes personnes étrangères aux membres familiers.
La peur de l’enfant débuterait par celle d’être touché ou d’être pris dans les bras. Elle passe par l’approche visuelle de l’enfant. Il note une variation de l’âge de 9 mois à deux ans. Elle est déterminée selon des critères tels que la proximité de la figure maternelle rassurante, de la zone d’approche de l’élément étranger, de l’état du nourrisson, de son milieu familier ou pas. La peur peut être signifiée par une résurgence des cris, de l’agrippement, des troubles du sommeil ou alimentaire, perte des acquis. S’opposant à René Spitz, John Bowlby nous dit entre autres qu’« Un autre effet est qu’en identifiant la crainte des étrangers à l’angoisse de séparation, on a confondu deux réactions qu’il est vital de maintenir distincts » (P436) Par cela Bowlby soutien la thèse de Freud à ce sujet qui sépare distinctement ces deux faits.
Alain Giraud